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"Toujours possible de faire bouger les choses..."

vendredi 8 juillet 2016, par Anne Doussin , Bernard de Monvallier

Actuellement les nouvelles qui nous parviennent d’Algérie dans les médias sont bien inquiétantes (voir notre rubrique « Brèves »). Mais n’y a-t-il que cela ? Comment au quotidien certaines personnes se mobilisent-elles pour créer des espaces d’échanges, de vivre ensemble, de solidarité, de démocratie ? Bernard de Monvallier, un ami de la 4acg résidant à Mostaganem et partageant quotidiennement la vie des algériens, nous en livre quelques des exemples dans un courrier de juin 2016. Laissons lui la parole.

1/ « Marchons ensemble »

Dans le groupe « Marchons ensemble » se retrouvent une fois par mois des jeunes algériens et quelques jeunes subsahariens. Objectif principal : marcher ensemble à la découverte d’un beau site des environs, et favoriser tout ce qui peut faire grandir les liens d’amitié entre tous ces jeunes, dans le respect des différences.
Un petit noyau de quelques jeunes se sent de plus en plus responsable de « marchons ensemble » . Cinq jeunes algériennes (qui ont entre 25 et 30 ans) participent régulièrement. Il a fallu du temps pour cela, car une jeune fille participe difficilement à des activités mixtes.
« Marchons ensemble » a vu le jour grâce à l’association de quartier « Colonel Lofti » qui a décidé d’arrêter toutes ses activités. Les responsables ont jeté l’éponge devant les difficultés multiples qu’ils ont du affronter. Le groupe s’est alors tourné vers la Zaouïa Alawiya très présente à Mostaganem. Ses adeptes veulent vivre un Islam ancré à la fois dans la tradition et dans la modernité. Son responsable Cheikh Khaled Bentounès s’oppose à l’Islam rigoriste et fermé, qu’on appelle aussi Salafisme et qui nous vient directement de l’Arabie Saoudite. Il se fait l’apôtre du « vivre ensemble » dans le respect des différences. Désormais à chaque sortie nous devons faire une déclaration à la police et nous mettons en entête : « Fondation Méditerranéenne du développement durable » (titre de la Zaouïa significatif de tout son travail pour le développement durable) Abdalah vice-président de la « Fondation » nous a dit : « Vous êtes une illustration concrète de ce « vivre ensemble » pour lequel nous nous battons, alors vous avez toute votre place avec nous. »

La Zaouïa Alawiya à Mostaganem

2/ Le journal « Réflexion »

Réflexion est un des quotidiens d’information de l’ouest algérien, entièrement rédigé en français, qui a son siège social à Mostaganem. Vous ne le trouvez plus ou difficilement à partir de 10 heures du matin. Depuis quelques mois une association appelée « Les amis qui aiment Réflexion » s’est créée. Ses membres sont les auteurs d’une page du journal et cela chaque jour ! Enfin des habitants osent s’exprimer, faire des propositions, et passer à l’action. En exemple les « Amis qui aiment Réflexion » ont lancé une pétition pour obtenir un centre de Radiothérapie à Mostaganem. Ils ont collecté 15000 signatures en quelques jours. En même temps de nombreuses personnes atteintes du cancer ont pu donner leur témoignage, et bien souvent crier leur détresse devant les difficultés à se faire soigner. Dans la foulée ces malades ont décidé de se constituer en association pour mieux se défendre et tisser des liens de solidarité. « Les amis du journal » ont pu se rendre en petite délégation pour rencontrer le ministre de la santé à Alger qui doit venir ici tout prochainement pour donner sa réponse.
(Le journal Réflexion peut être lu sur le net.)

3/Une association de parents d’élèves dans un lycée.

Initiative d’un ami de longue date, qui a pu contribuer à changer ce qui semblait immuable dans le lycée où un des ses enfants poursuit ses études. En avril 2015, avec quelques parents d’élèves et après trois assemblées générales (pour atteindre le quorum), ils décident de créer une association de parents dans ce lycée situé au cœur d’une importante cité dont la majorité de la population est de milieu populaire. Mais pour avoir le feu vert, il a fallu attendre novembre 2015 et cela ne s’est pas fait tout seul. Notre ami a dû frapper à bien des portes en commençant par la commune qui transmet le dossier à la police, puis de la police à l’éducation nationale et enfin à la wilaya. Et il ne compte pas le nombre de dossiers qu’il a dû remplir. Sept mois pour obtenir l’agrément , sept mois où il a fallu frapper aux portes de ces diverses administrations publiques. « Si tu ne les relances pas, ils peuvent laisser traîner ton dossier sur une étagère et oublier de le prendre en compte ». Mais depuis le 4 novembre, la petite équipe de parents sous la conduite de M., fait bouger ce lycée de 800 élèves. Le principal du lycée ne voyait pas d’un œil très favorable ces parents intéressés par la marche de son établissement. Il fallait donc gagner sa confiance ce qui va se faire progressivement, et aussi gagner la confiance des enseignants le plus souvent seuls face à leurs difficultés (élèves rebelles qui narguent leurs maîtres, élèves de familles très démunies qui décrochent en cours d’année, élèves sous l’emprise de la drogue, élèves seuls avec leur maman etc...). M. et les parents qui sont avec lui vont donc apprivoiser en quelque sorte tout le corps enseignant ainsi que l’administration plus poussée à régler les problèmes par des sanctions et quelque fois des exclusions des éléments les plus récalcitrants. Les représentants des parents d’élèves participent aux réunions des conseils de classe du premier semestre. L’association découvre les problèmes pédagogiques essentiels, le travail d’écoute et les difficultés rencontrés par les enseignants. Chaque semaine une rencontre se fait avec le principal et ses adjoints. C’est très exigeant pour ces parents, mais leurs motivations n’en sont que plus fortes quand ils perçoivent le bien que peuvent en retirer leur enfant. Mettre en valeur les talents que chaque jeune porte en lui commence à devenir la priorité pour tous ces acteurs : enseignants, personnel administratif et parents. Tel jeune est en échec scolaire mais il aime dessiner, tel autre est incapable d’attention durant les cours, mais il se passionne pour le bricolage etc., alors à l’intérieur même du Lycée des commissions se mettent en place en vue de donner une chance à tous les jeunes de révéler leurs talents et de favoriser l’épanouissement de chacun. Dans cette dynamique, des commissions paritaires se mettent en place (commission d’écoute, des finances et comptabilité). Il reste celle de l’activité culturelle et sportive. Sur cette lancée et au début du 2e semestre, on organise une rencontre avec les responsables de classe et le directeur du lycée pour faire ressortir dans chaque classe les cas sociaux, les élèves ayant des retards scolaires et des cas qui nécessitent l’intervention d’un psychologue. Dans ce riche débat, la question est lancée pour savoir comment prendre en charge les élèves drogués ou ceux ayant des comportements violents dans le lycée.
On ne peut continuer à vouloir faire passer tous les élèves par le même moule. Mais les filières des centres de formation professionnelle tel que les CFPA sont déconsidérés alors qu’ils peuvent donner une chance d’avenir à tous ces jeunes en mal être. En quelques mois, le climat dans cet établissement est en train de changer : des enseignants reprennent confiance et des parents regardent autrement leur enfant. M. aime me dire « Tu vois comment nous arrivons à vivre une authentique démocratie dans ce petit espace, et cela me confirme que dans notre pays quand la confiance est retrouvée la démocratie est possible !".

Bien souvent on entend : « Ici on ne peut rien faire, car tout est verrouillé du fait de la corruption, d’une bureaucratie généralisée, du copinage » (on ne choisit pas de placer pour des postes de responsabilités les plus compétents, mais les « amis » ...)
Même si cela fait partie de la réalité, il est toujours possible de faire bouger les choses.

Messages

  • Exact ! Il est possible de faire bouger les choses par petites doses ici et là. certains aiment les difficultés , d’autres en font des défis. Mostaganem est la perle de la Méditerranée (Parole du Président de la république), je rajouterai Ville de culte et de cultures et donc de paix. les choses bougent dans notre ville surtout dans le domaine de l’art et principalement à la réception du Théâtre régional ’Djillali Beabdelhalim’, nouvelle bâtisse (Théâtre) la 1re depuis l’indépendance de l’Algérie. Je viens d’assister à une trentaine de représentations, je peux vous dire que la parole est libérée (Voir mes articles sur le facebook du Théâtre régional de Mostaganem).

  • CHERCHE TRACE DE MON GRAND PERE ET SON FRERE BOUADJADJA AISSA NE EN 1892 BOUADJADJA MOHAMED NE EN 1894 FILS D HAMED ET DE GWILA ZOHRA

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