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Répression accrue en Algérie, les associations dans le collimateur, la France visée

lundi 31 mai 2021, par Michel Berthelemy

Documentaire incendiaire contre les medias et les puissances étrangères, dont la France, un patron de medias placé sous contrôle judiciaire, procédure judiciaire contre le RAJ : la répression se déchaîne en Algérie.

En Algérie, un documentaire produit par l’armée diabolise opposants et journalistes.
Le reportage, diffusé mi-mai, dénonce des tentatives de déstabilisation menées « via les médias par des puissances étrangères », dont la France.

Par Madjid Zerrouky , France Afrique 25 mai

Il semble loin le temps où l’armée algérienne faisait mine de se tenir éloignée de la « politique ». Elle occupe désormais au grand jour les écrans de la télévision publique. Jusqu’à y diffuser un documentaire produit par ses soins pour y diaboliser ses opposants et les journalistes un peu trop critiques à son goût.
« Une guerre de quatrième génération, informationnelle, menée via les médias par des puissances étrangères dont le dessein est un retour du colonialisme et une nouvelle occupation du pays » : c’est le conflit qui, si l’on en croit les militaires, oppose l’Etat à ses « ennemis ». Soit l’opposition et les médias.

« Les graines de la destruction »

Intitulé Qui vise l’Algérie ? le documentaire présente pendant 37 minutes le Hirak comme un mouvement infiltré par des organisations terroristes. Les indépendantistes kabyles, la mouvance islamiste, les télévisions publiques françaises, la France, Israël et le Maroc sont cités pêle-mêle comme les instigateurs du complot. Un ensemble de forces qui « s’agitent sous le couvert du Hirak pour planter les graines de la destruction », affirme le reportage, agrémenté d’une bande-son aux accords dramatiques et d’images de Palestine, de la guerre d’Algérie ou d’attentats.
En tombée de rideau de cette charge d’une violence inouïe, ponctuée par les avis de deux « experts » présentés comme chercheurs en sciences internationales – en fait le directeur de la chaîne Canal Algérie et un cadre du ministère de l’intérieur –, le générique est inédit. Diffusé sur la principale chaîne publique le 17 mai, Qui vise l’Algérie ? a été produit par la Société militaire de production audiovisuelle, un organisme du ministère de la défense, et entièrement réalisé par des officiers, de la prise de son au montage.

Pourquoi l’armée algérienne s’est-elle elle-même exposée, sans se réfugier derrière une production maison de médias gouvernementaux ? Le lendemain de la première diffusion, le Haut Conseil de sécurité algérien (HCS) classait les islamistes du mouvement Rachad et les indépendantismes du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) comme « organisations terroristes ».

La France visée

Mais si les premiers sont effectivement présents dans le Hirak, ils sont très loin d’y être majoritaires, les manifestations rassemblant divers courants de l’opposition. Quant aux seconds, ils n’ont jamais caché leur mépris pour un mouvement de protestation qu’ils jugent trop national et « algérien ».
Qu’importe. Les deux groupes, « racistes et haineux », auxquelles les puissances étrangères ont confié la mission de déstabiliser le pays, auraient fait de certaines capitales leur base arrière et de recrutement, décrit une voix off. A l’écran, défilent les images des plateaux des télévisions TV5 Monde et France 24 et celles de journalistes d’origine algérienne qui y travaillent ou d’opposants algériens qui y ont été conviés.
Les figures du mouvement islamiste ou du MAK ont beau n’avoir jamais été invitées à s’exprimer sur France 24 ou TV5 Monde, les militaires producteurs visent néanmoins la France. Et ce, même si Paris ne cesse de ménager Alger depuis l’élection d’Abdelmadjid Tebboune. Les journalistes d’origine algérienne qui travaillent dans des médias de l’ancienne puissance coloniale endossent, eux, l’habit du traître.

En Algérie même, un journaliste, Rabah Kareche, est en prison. Une seconde, Kenza Khatto, a été condamnée le 25 mai en première instance à une peine d’emprisonnement d’un an. Elle avait été arrêtée alors qu’elle couvrait une manifestation à Alger.
En deux semaines, plus de 2 000 manifestants ont été interpellés, dont près d’une centaine a été placée en garde à vue et une soixantaine sous mandat de dépôt, selon la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH).

Madjid Zerrouky

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/05/28/en-algerie-un-documentaire-produit-par-l-armee-diabolise-opposants-et-journalistes_6081920_3212.html?xtor&&M_BT=48247604562293#x3D;EPR-33280896-[afrique]-20210529-[zone_edito_1_titre_3]

Signe supplémentaire d’un durcissement du régime, le directeur de la station algérienne Radio M et du site d’information Maghreb émergent, Ihsane El Kadi, a été placé sous contrôle judiciaire, mardi 18 mai, « par le juge d’instruction près le tribunal de Sidi M’hamed à Alger » https://www.lemonde.fr/afrique/article/2021/05/19/en-algerie-le-directeur-de-medias-proches-du-hirak-place-sous-controle-judiciaire_6080691_3212.html

Une réaction du RCD : https://www.elwatan.com/edition/actualite/criminalisation-du-hirak-le-rcd-denonce-un-climat-de-terreur-30-05-2021

Enfin, nous apprenons par une source amie que le ministère de l’intérieur engage une procédure judiciaire auprès du tribunal administratif contre le RAJ (Rassemblement Action Jeunesse).
Communiqué du Bureau national du RAJ :
Le RAJ a reçu ce mercredi 26 mai 2021 par le biais d’un huissier de justice une citation a comparaître devant le tribunal administratif d’Alger, suite à une requête déposée par le ministère de l’intérieur et des collectivités locales sollicitant la dissolution de l’association RAJ sous prétexte que les activités de l’association sont en violation de la loi 12/06 régissant les associations et en contradiction avec les objectifs énumérés dans les statuts de l’association.
Le RAJ informe aussi que le camarade Abdelouhab Fersaoui, président du RAJ a reçu aujourd’hui une convocation de la police pour se présenter dans les plus bref délais au commissariat central de Bejaia.
Le RAJ va constituer un collectif d’avocats pour répondre à la requête déposée par le ministère de l’intérieur et tiendra l’opinion publique de l’évolution de la procédure administrative et de la convocation du président de l’association par la police.

Alger le 26 mai 2021
P/RAJ
Le bureau national

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