Bilan des activités du Collectif messin du 23 juillet 1961

Jean-Marie Mire est membre du Collectif messin du 23 juillet 1961 et correspondant de la 4ACG pour le Grand-Est. Ce Collectif, devenu association en 2016, a été créé en mémoire de « la nuit des paras » : dans la nuit du 23 juillet au 24 juillet 1961, la ville de Metz a été le théâtre d’un épisode sanglant et pourtant méconnu de la guerre d’Algérie. Suite à une rixe dans un bar, pendant toute une nuit et une journée, 400 paras du 1 ?? régiment de chasseurs parachutistes (1 ?? RCP), stationné à Metz, ont mené dans la ville une véritable « chasse aux Algériens ». Le bilan officiel est de quatre morts et 27 blessés. Loin de ce qu’ont affirmé les témoins de l’époque.

En souvenir de cette tragédie, le Collectif organise régulièrement des rencontres, projections et conférences destinées à rapprocher les communautés algérienne et française. Jean-Marie en fait ici le bilan pour l’année écoulée.

– ?Le 18 février 2022, projection du film de Dorothée Myriam Khellou : « À Mansourah, tu nous a séparés », en présence du père de la réalisatrice, Malek Kellou, alors jeune garçon, qui habitait à l’époque le camp de regroupement de Mansourah.
C’est un film d’une grande délicatesse, plein de mystère. C’est le retour d’un homme dans le village de son enfance. Le film introduit des images plus grandes, des espaces plus vastes, parcourus par le bruit du vent, dans les souvenirs atroces de la lutte, du napalm et de la faim. Comment évoquer la séquestration des terres, la déportation des populations, l’anéantissement des structures sociales dans l’échange de regards entre la caméra, le père et les parents et amis d’alors. La grande histoire traverse la petite histoire. Celle des individus (et pas l’inverse). La mémoire n’est pas un travail vers la vérité des faits mais vers la profondeur des individus. Belle leçon pour notre Collectif.

– ?Le 24 juin, conférence sur « Affronter le passé colonial en France » avec Gilles Manceron et Samia Messaoudi, qui a réuni une cinquantaine de personnes.

– ?Le 23 juillet, à Metz, lecture théâtralisée de la pièce de Didier Doumergue « L’enquête ». Didier est membre du Collectif du 23 juillet, il a quitté l’Algérie à l’âge de 12 ans. Pour cette lecture, faite avec la participation des comédiens du Studiolo. plus d’une centaine de personnes étaient présentes.
« Dans un cimetière en Kabylie, de nos jours, une grand-mère sort de sa tombe et presse son petit-fils Akrane de cesser de marcher dans le hirak et de se rendre en Lorraine… ». Un débat a suivi la lecture.

– ?En juin, des membres du Collectif ont apporté leur concours à l’exposition du Frac, de Ouarsila Arras, de « Bagdad à Alger », et rencontré des personnalités marquantes de la diaspora algérienne de Metz, lors d’une journée avec des collégiens de la ville.

– ?Rencontre avec Sébastien Wagner, directeur des éditions Paraiges, pour évoquer la traduction de la thèse de Lucas Hardt. Lucas est franco-allemand, maître de conférence en Allemagne. Il est membre de notre Collectif. Sa thèse s’appelle « Effets de la guerre d’indépendance algérienne sur les migrants nord-africains en Lorraine (1954 – 1962). »

– ?Durant toute l’année, des rencontres ont permis aux membres du Collectif de préparer le colloque sur les « optants ». La synthèse de ces rencontres porte sur « le cent cinquantième anniversaire de l’émigration des « optant mosellans et alsaciens » en Algérie (1872) » : il y a 150 ans, quelque 12 ?000 Mosellans et Alsaciens quittaient leurs villes ou villages pour s’installer en Algérie. En faisant ce choix, ils ont alors opté pour la nationalité française afin de ne pas se voir attribuer la nationalité allemande à la suite de l’annexion de l’Alsace-Lorraine.
Pour commémorer cette émigration et en comprendre le déroulement, l’Association-Collectif du 23 juillet 1961 organisera en 2023 une journée d’étude consacrée à cet épisode oublié de la « Moselle déracinée ».

Jean-Marie Mire