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A l’occasion du 19 mars, Benjamin Stora évoque « la guerre des mémoires ». Et cite, au passage, la 4ACG.

lundi 21 mars 2016, par Michel Berthelemy

Pour la première fois cette année, le Président de la République a participé en personne, au Mémorial du Quai Branly, à la commémoration du 19 mars 1962, date de la signature des Accords d’Evian instaurant le cessez-le-feu en Algérie.

On aurait pu espérer que cette date, qui mit fin à une guerre et marqua un retour à la paix, contribue à apaiser les mémoires. Hélas, il n’en est rien. Plusieurs villes de France ont refusé de participer officiellement à quelque commémoration que ce soit. Jusqu’à un Président de région, Monsieur Estrosi, qui a même refusé de déléguer un adjoint aux cérémonies. Sans parler d’un ancien Président de la République qui accuse son successeur de vouloir « entretenir la guerre des mémoires ». Ce à quoi a tenté de répondre le-dit successeur : « Alimenter la guerre des mémoires, c’est rester prisonnier du passé, faire la paix des mémoires c’est regarder vers l’avenir ».

Dans un entretien accordé à l’Humanité-Dimanche (17/23 mars 2016), Benjamin Stora constate que la situation actuelle provient du fait que « nous sommes sortis dans les années 1990/2000, de trente ans de silence, et que malheureusement, cette libération de la parole s’est faite en ordre dispersé, par la constitution de groupes de mémoires communautarisés, et non autour d’événements culturels célébrant la fraternité entre les anciens ennemis. Aucune date consensuelle de la célébration de la fin du conflit n’a été trouvée par les anciens acteurs de la guerre : les Algériens immigrés en France voudraient que ce soit le 17 octobre 1961 (en souvenir de la répression du 17 octobre 1961 à Paris), les Algériens du FLN le 19 mars (accords d’Evian), les Pieds-Noirs le 5 juillet en souvenir des enlèvements de pieds-noirs d’Oran par le FLN, tandis que les Harkis refusent le 19 mars ».

Pour Benjamin Stora, « cette absence de date est symptomatique d’une guerre des mémoires. C’est chacun son histoire, personne ne veut reconnaître la souffrance de l’autre ». Pourtant, il laisse entendre qu’avec un peu de bonne volonté, il serait possible de sortir de cette impasse : « quelques petites associations », précise-t-il, « telles la 4ACG ou Harkis et Droits de l’Homme, tentent de lancer des passerelles entre ces mémoires ». Mais il poursuit, avec une pointe de regret : « à côté de cela, des groupes puissants – de soldats, de pieds-noirs, de harkis - entretiennent des mémoires revanchardes et dangereuses, car elles donnent de l’eau au moulin du FN, qui propose un projet de société basé sur la séparation entre ce qu’ils définissent comme Blancs et Arabes. C’est ce que je nomme le sudisme à la française ».

Cette question de la mémoire est un thème cher à Benjamin Stora, qu’il ne cesse d’interroger dans ses écrits. Son dernier ouvrage, publié avec Alexis Jenni, porte un titre explicite : "Mémoires dangereuses". Comme si la guerre d’Algérie n’en finissait pas de finir...

"Mémoires dangereuses", de Benjamin Stora et Alexis Jenni, est édité chez Albin Michel.

Lire la réaction de la presse algérienne, sur El Watan du 19 mars :
http://www.elwatan.com//actualite/un-geste-positif-apprecie-en-algerie-20-03-2016-316994_109.php

Écouter l’interview de Benjamin Stora sur Europe1
http://www.msn.com/fr-be/actualite/monde/benjamin-stora-la-guerre-dalg%C3%A9rie-continue-dans-les-t%C3%AAtes-les-c%C5%93urs-les-m%C3%A9moires/vi-BBqBFRC?refvid=AAaru2Z

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