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Première intervention de 4acg au Lycée St-Vincent de Rennes

jeudi 14 février 2013, par Gérard Webmestre

Intervention de 5 membres de 4acg devant les élèves de terminale du lycée St Vincent de Rennes.

Le 24 janvier 2013, Pierre Sellier, Michel Cariou, Hubert Rouaud, Yannick Véron et Stanislas Hutin, membres de la 4ACG et anciens appelés de la guerre d’Algérie, ont répondu à l’invitation du Lycée Saint Vincent de Rennes pour témoigner devant les élèves de terminales.

Une projection d’"En finir avec la guerre", le film de Mehdi Lallaoui consacré à 4ACG avait précédé cette rencontre

A nouveau, force est de constater que cette tranche d’histoire si faiblement relatée dans les manuels et les programmes d’enseignement, si profondément ignorée de ces jeunes, bien qu’elle ne leur soit pas si lointaine puisque vécue par la génération de leurs grands-pères, n’en n’est pas moins pour eux d’un indéniable intérêt.

Ils étaient une bonne centaine réunis dans l’amphithéâtre du lycée entourés de quelques professeurs.Après une très brève présentation personnelle des intervenants, une vidéo a rappelé quelques grands films sur la guerre d’Algérie : « RAS » d’Yves Boisset, « Avoir vingt ans dans les Aures » de Réné Vautier, « L’Ennemi Intime » de Patrick Rotman, « Hors la loi » de Rachid Bouchareb.
Limitée à une heure trente, cette intervention ne nous a pas permis de répondre à l’abondance des questions préparées par les élèves et leurs professeurs et formulées dans un questionnaire qui nous avait été communiqué au préalable.
En terminale, l’enseignement de l’histoire doit conduire les élèves à appréhender l’essentielle distinction entre mémoire et histoire. Aussi, en préambule à nos témoignages, avons-nous marqué cette différence. Mémoire n’est pas histoire. En tant que témoins, notre mémoire n’est que le véhicule des matériaux qui contribuent à fonder l’histoire. Eminemment personnels, nos témoignages relèvent d’une mémoire plurielle. Mais, après si longtemps, celle-ci peut-elle être fidèle ? Elle est forcément diversifiée ; elle peut être sélective, voire contradictoire, mais elle se trouve, pour trop d’entre nous, anciens appelés, marquée des dénominateurs communs que sont la meurtrissure de notre jeunesse et la conscience que la guerre est un mal absolu.

Questions et réponses ont permis à ces jeunes de parcourir les étapes de notre funeste aventure.

Au départ : dans quel esprit avons-nous embarqué ? La fleur au fusil ? Avions-nous une conscience politique et comment celle-ci a-t-elle évolué ?
Sur le terrain, quelle découverte du milieu au plan économique et social, des relations algériens-européens ? Quel était notre rapport à l’armée de métier, à sa hiérarchie, aux harkis ? Quelles étaient les pratiques mises sous silence par l’Etat ou l’armée (exactions, torture…) ? Du côté rebelle, quelles pratiques également ? Quelles formes possibles de résistance éventuelle aux dérives de l’armée ? Etait-il possible de refuser certains ordres ? Positions de l’Eglise en général, des aumôniers militaires en particulier ? La guerre fût-elle l’occasion d’un affrontement entre musulmans et chrétiens ?
A notre retour, quelle fût notre attitude ? Quel accueil ? Pourquoi ce silence des appelés ? Avions-nous reçu des consignes de silence ?
Et maintenant – Nos rapports avec d’autres organisations d’anciens combattants ? La confrontation des mémoires, la nôtre et celle construite par les Etats antagonistes ? Nos regrets, nos remords ? La colonisation a-t-elle été totalement négative ? L’Afrique, actuellement, ne fait-elle pas l’objet d’une recolonisation économique ? Nos réactions au discours de Hollande à Alger ? Différence de sensibilité entre guerres France/Allemagne et France/Algérie ?

En conclusion -. Pourquoi témoignons-nous ainsi ?

A ceux, en petit nombre ici, qui estiment qu’il n’est ni utile, ni sain de réveiller ce passé, qu’il faut savoir tourner la page, nous nous permettons de leur dire ceci : ces jeunes ont interrogé notre mémoire. Puissent-ils continuer de l’interroger ainsi ; puissent-ils continuer de s’interroger eux-mêmes sur les valeurs, comme sur les failles de notre culture, cette culture qui a su proclamer l’universalité des droits de l’homme, mais qui n’a pas été capable d’éviter les guerres de sa décolonisation. Puissent ces jeunes réaliser l’inanité de toute guerre et se convaincre que, dans leurs responsabilités civiques futures, c’est à eux qu’il appartiendra d’inventer les moyens du « plus jamais ça.
 
Nous avons demandé qu’un compte-rendu soit rédigé par les élèves, afin de mesurer l’impact de telles interventions.
Une deuxième intervention est prévue prochainement dans ce même lycée auprès des classes de première dont le programme inclut la Guerre d’Algérie. Une suggestion partant du constat suivant : à la fin de la séance, à la sortie de la salle, plusieurs élèves se sont instinctivement rapprochés des intervenants, manifestant le désir d’un dialogue complémentaire et posant des questions d’actualité. Il serait, je pense, profitable de répondre à cette demande spontanée, en laissant aux élèves, après l’intervention « officielle », un peu de temps pour une rencontre informelle avec les intervenants, pour des échanges débridés, hors du questionnement un peu convenu et libérés de l’appréhension à s’exprimer en public.
Stanislas H.

L’opinion d’un élève de terminale sur notre intervention

Nous, élèves en classe de terminale au lycée St Vincent Providence, avons eu l’occasion et la chance d’accueillir en nos murs des membres de l’association 4ACG, l’Association des Anciens Appelés en Algérie Contre la Guerre, à l’occasion d’une séance de questions.

Ce groupe a pour but de rappeler aux jeunes, tant Français qu’Algériens, les circonstances et les événements de la guerre d’Algérie, vieille déjà d’un demi-siècle, mais également et surtout de livrer un regard lucide et honnête sur le conflit lui-même au travers de l’expérience des intervenants, tous anciens appelés du contingent à l’époque (entre 1955 et 1962).

En effet, pour des jeunes hommes vivant dans l’après-guerre et le début d’une société prospère, l’enrôlement sous les drapeaux pour une durée d’une moyenne de 24 mois, dans le cadre d’une action de maintien de l’ordre dans un pays inconnu culturellement, légitime dans son droit d’accéder à l’indépendance, face à un ennemi insaisissable, impitoyable, auquel les autorités françaises répondent dans le même langage, celui de la violence, pour ces jeunes hommes-là le souvenir est fort et la nécessité de transmettre cette mémoire s’impose.

C’est pourquoi, au fil des questions, nos interlocuteurs nous ont, bien au delà de la torture récurrente, restitué, à l’aide de leurs expériences personnelles, une vision d’ensemble du conflit, sur les actions politiques et militaires entreprises, le positionnement de l’opinion publique, sur la volonté générale d’oublier ces événements, qui représentent pourtant une partie non négligeable de l’histoire de notre pays à l’heure de la Ve République naissante, et surtout sur la difficulté pour ces anciens soldats de taire ce qu’ils avaient vécu une fois rentrés en France.

La rencontre a donc permis de transmettre aux jeunes générations cette mémoire complexe que représente la guerre d’Algérie, et plus particulièrement de produire un message de paix et d’espérance pour l’avenir.

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