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A la médiathéque de Rezé (44)

Laurent Mauvignier a présenté son livre "Des hommes"

Les traces laissées dans des vies par la guerre d’Algérie.

mercredi 14 avril 2010, par Gérard Webmestre

La présentation d’un livre par son auteur est toujours un moment de partage intense. Et ce 6 avril 2010, à Rezé, nous étions tous attentifs et passionnés
par la force du livre, la sincérité de l’auteur, et surtout par un partage d’émotions.

Cette soirée, ce livre renvoyaient certains participants à leurs souvenirs d’appelés en Algérie, et les traces douloureuses qui sont encore là. Pour tous, cela nous interrogeait sur la violence, celle des autres, la nôtre "toujours à fleur de peau".

C’est un livre qu’il désirait écrire depuis longtemps, nous dit-il... issu de ses souvenirs d’enfance et de la conscience acquise par la suite de cette page de notre histoire.

Que savait-il, enfant, de la guerre d’Algérie ?

Son père, qui avait participé à cette guerre, n’en parlait pas. Mais des photos, des discours de l’entourage, les échanges avec les copains à l’école alimentaient son imaginaire d’enfant.

Deux certitudes pour ces enfants, dans le contexte de l’époque :
on devenait un homme quand on avait fait la guerre,
et sur cette guerre d’Algérie, « on savait qu’on ne savait pas ».

Adulte, Laurent Mauvignier a conscience d’appartenir à la première génération sans guerre.
Le décès de son père l’amène à vouloir « combler le vide » de la mémoire, et ce roman est une fiction bâtie à partir d’images engrangées.

Laurent Mauvignier ne voulait pas faire un roman sur la guerre d’Algérie. Le sujet de cette œuvre, c’est « l’après », ce que les personnes ensuite ont vécu, comment cette guerre a marqué toute leur vie, infléchi leur destinée. L’auteur conçoit un roman comme « le temps d’accompagner une personne, une histoire ». Car, toujours, « dans le rapport de l’homme à la guerre, il y a un avant, un pendant, et un après ».

Bernard, le personnage principal, n’est « qu’un bloc de traumatismes », le « trou noir de la mémoire collective ». Le roman est le « modèle d’une rencontre », il nous fait découvrir Bernard « de l’apparence à ce qu’il est ». Pour l’anniversaire de sa sœur, Bernard n’a à offrir « que sa douleur » , symbolisée par une broche, bijou de prix.

Le roman est construit comme une succession de récits, les gens « disent » ce qu’ils voient, ce qu’ils ressentent. La lecture est rapide, au rythme de la pensée... C’est ainsi que Laurent Mauvignier nous lit le premier chapitre.

Dans la partie relatant la guerre d’Algérie, on retrouve les différences entre les hommes : les appelés, plus ou moins conscients des enjeux politiques, les harkis, les pieds noirs, les fellaghas...Le monologue transmet « ce qui est perçu », sans jugement, sans échelle de valeurs, et nous restitue l’humanité des personnages.

La violence décrite et exprimée dans ce passage, éprouvante pour le lecteur, Laurent Mauvignier ne l’a « découverte qu’après » l’avoir écrite. Dans notre société occidentale, c’est le sport qui est devenu « une métaphore de guerre »

C’est aussi un roman du « retardement », où l’expression de ce qui va advenir, de ce que le lecteur attend ou pressent parfois, est toujours différée. La construction du roman en monologues, « une parole parcellaire qui rassure » aide à créer ce retardement.

Dans la salle se trouvaient des hommes ayant vécu cette guerre d’Algérie, tous fortement touchés. D’une voix empreinte d’émotion, ils ont salué l’authenticité de ce récit, tant sur la description de ce temps passé en Algérie que sur l’après, le silence qui les a accueillis à leur retour, l’incrédulité, les cauchemars toujours présents... L’un d’eux n’avait pas pu lire en entier le livre, qui le bouleversait trop... un autre avait préparé puis lu ce qu’il souhaitait exprimer suite à sa lecture...

« Des hommes » : fiction peut-être, mais si proche de leur vécu, celui de « là-bas », celui de maintenant.

(Les termes et expressions entre guillemets sont de Laurent Mauvignier)

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